Les taxidermistes
Les taxidermistes
De même que les chasseurs qui étaient leurs principaux clients, les taxidermistes, du moins en France et en Europe –il n’en est pas de même aux États-Unis et au Canada–, ont de plus en plus de mal à vivre de leur métier ou plutôt de leur art.
Les taxidermistes préfèrent, aujourd’hui, qu’on les appelle naturalistes.
Devant la désaffection, et même l’hostilité dont est victime la chasse en Europe en général et en France en particulier, les taxidermistes qui travaillent encore en ce début de XXIème cabinets de curiosités, se spécialisent dans les collections de coquillages, d’insectes (papillons, coléoptères et autres) et pour certains dans la taxidermie des poissons.
D’après la chambre syndicale du métier, alors qu’il y avait un peu plus de 1 000 ateliers en France, il y a vingt ans, il en resterait seulement un gros tiers aujourd’hui, soit entre 300 et 350 artisans indépendants. Seules trois ou quatre entreprises emploient des salariés. Employés ou indépendants, les taxidermistes travaillent pourtant dans un but pédagogique, scientifique ou artistique.
Un travail de passion nécessitant des talents de dessinateur et de sculpteur.
Ce métier très pointu s’adressant en priorité à des passionnés et offrant peu de débouchés – surtout depuis la loi sur la préservation des espèces – nécessite des compétences techniques reconnues. En dehors des collectionneurs d’oiseaux, de papillons ou de coquillages, leur clientèle de chasseurs qui était encore, il y a un quart de siècle leur principal gagne-pain, n’est malheureusement pas remplacée comme c’est le cas au Royaume-Uni et aux États-Unis par les pêcheurs.
Seuls les musées d’Histoire naturelle ou le Musée de la Chasse à Paris, rue des Archives, embauchent encore de jeunes talents davantage pour entretenir ou restaurer les collections existantes et souvent anciennes que pour créer.
La taxidermie est un travail de passionnés qui demande de connaître les techniques de dépouillage, de tannage des peaux, de montage des animaux dans des positions réalistes, et donc des talents de dessinateur, de sculpteur et d’observateur.
Le taxidermiste doit connaître de très nombreuses espèces, tant indigènes que exotiques, leur mode de vie, leur nourriture… Il doit savoir où trouver des ouvrages ou des documents concernant les espèces rares ou en voie de disparition.
Aujourd’hui, le métier se perd du fait des tracasseries administratives.
D’ailleurs, à ce sujet, les professionnels de la taxidermie sont de plus en plus confrontés à des « descentes » d’agents de la biodiversité, qui viennent contrôler si dans leurs congélateurs il n’y a pas d’espèces protégées. Plus un seul taxidermiste n’acceptera de naturaliser un petit rapace diurne ou nocturne ramassé mort sur la route après avoir heurté un véhicule.
Alors que l’agriculture intensive et l’utilisation des pesticides, ou plutôt comme il faut dire des « phytosanitaires » sont responsables des neuf-dixièmes de la disparition des oiseaux et des petits mammifères de nos régions, qu’un agent du ministère de l’Environnement découvre « naturalisé » un oiseau ou un mustélidé (famille des belettes) protégé chez un taxidermiste et son atelier sera fermé.
Sur le plan international, la Convention de Washington réglemente le commerce des espèces menacées d’extinction, y compris sous forme naturalisée, de peaux, crânes, dents, griffes, ou tout autre sous-produit. À côté d’un considérable trafic d’animaux vivants, il existe, il est vrai, un trafic non négligeable d’animaux naturalisés ou de peaux exportées frauduleusement à des fins de taxidermie (tigres, lions, léopards, ours blancs et autres espèces exotiques).
En conséquence, tous les taxidermistes professionnels inscrits au registre des métiers doivent connaître les règlementations internationales mais également intra-communautaires sur la circulation des espèces protégées par la Convention sur le commerce international des espèces sauvages (CITES), aussi appelée Convention de Washington, en vigueur depuis le 1er juillet 1975. Celle-ci définit dans son règlement de base quatre annexes (A, B, C et D).
En plus des formalités douanières, les espèces figurant à l’annexe A, y compris lorsqu’elles sont naturalisées, doivent recevoir un Certificat intra-communautaire (CIC) délivré par l’organe de gestion du pays –la Direction de l’environnement (DIREN) en France– à la demande du détenteur de l’animal. Ce certificat doit accompagner tout spécimen naturalisé notamment lorsqu’il est déplacé.
Papillons et coquillages font vivre le métier.
Enfin, en France, la naturalisation d’un spécimen appartenant à une espèce protégée de la faune sauvage ainsi que son exposition au public et son déplacement doivent faire l’objet d’une autorisation préfectorale (arrêté du 26 novembre 2013) comme le confirme une réponse récente du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie.
Devant toutes ces tracasseries administratives, on comprend que le métier de taxidermiste ne fasse plus recette.
Seules les papillons, coléoptères et autres insectes ainsi que les coquillages, collections qui ne relèvent pas vraiment de la taxidermie stricto sensu, puisque ces animaux invertébrés ne possèdent pas de peau à proprement parler, sont aujourd’hui à la mode dans notre pays et permettent à des taxidermistes-naturalistes, de continuer de vivre de leur métier.
Enfin, soulignons-le, la taxidermie ou quelquefois le moulage (en résine ou fibre de verre) de poissons records ou trophées (brochets, truites, saumons, et poissons carnassiers marins…) revient à la mode en décoration ou dans les cabinets de curiosités et permet à quelques artisans spécialisés de continuer d’exercer leur métier-passion.