Les moulinets de pêche au gros
Les moulinets de pêche au gros
C’est en 1902 qu’un ingénieur de New York, Edward Vom Hofe, lui-même pêcheur de gros tarpons en Floride, inventa le premier moulinet avec frein « à tambour » intégré dans la bobine.
Auparavant les pêcheurs, pour ralentir (freiner) la rotation de la bobine, ne pouvaient y exercer une pression des doigts que par l’intermédiaire d’une pièce de cuir. Très vite, dans les années qui suivirent, Vom Hofe breveta un système qui permettait au moyen d’une molette fixée sur la manivelle du moulinet, de régler la tension du « frein ».
Entre 1905 et 1950, la famille Vom Hofe fabriqua des milliers de moulinets de toutes tailles destinés à la pêche des grands poissons marins. Non seulement ces moulinets fonctionnaient, et quand ils ont été bien entretenus fonctionnent encore aujourd’hui à merveille, mais en plus ils étaient splendides, réalisés avec des flasques noires de « hard rubber » (sorte de bakélite) et des bâtis en « german silver », alliage d’argent et de nickel, résistant à l’oxydation (rouille) en milieu marin.
Plus de cent modèles différents de moulinets Vom Hofe, pour la pêche des petits thons aux plus gros espadons et marlins, figurent dans les différents catalogues de la Maison. Selon leurs tailles et leur rareté, les « Vom Hofe reels » se négocient aujourd’hui, quand ils sont en bon état, entre 300-400 euros et plus de 5 000 euros.
Les thons rouges font actuellement un retour en force dans l’Atlantique Nord.
Mais il n’y a pas qu’outre-Atlantique, que les pêcheurs sportifs s’intéressèrent aux gros poissons marins et à leur pêche sportive. Si les marlins et autres espèces tropicales étaient et sont encore aujourd’hui absents des eaux européennes, les thons rouges y étaient bien représentés, et souvent très près de nos côtes, où ils venaient se gaver de sardines en Bretagne et de harengs et maquereaux dans la Mer du Nord.
Remarquons que plus d’un demi-siècle plus tard, au jour d’aujourd’hui, les thons rouges (Thunnus thymus) ont fait depuis ces dernières années un retour en force sur les côtes françaises de l’Atlantique.
Dès 1921, la célèbre maison Hardy mit au point de magnifiques moulinets spécialement destinés à la pêche des thons rouges géants (jusqu’à plus de 400/500 kilos sur nos côtes). Pendant trente ans, différents modèles en tailles de ces moulinets figurèrent dans les pages des catalogues Hardy sous le nom de Fortuna –en fait, jeu de mots « for Tuna », « pour le Thon »). Réalisés en alliage d’aluminium ou d’acier (monel) inaltérable à l’eau de mer, ces moulinets, en particulier dans les grandes tailles, sont très recherchés par les collectionneurs.
Pas autant, toutefois, que les modèles « Alma » et « Zane Grey » que le célèbre et richissime pêcheur américain demanda à Hardy de fabriquer selon ses spécifications. Fabriqués seulement, compte tenu de leur prix, en quelques dizaines d’exemplaires, et en trois tailles, entre 1928 et 1953, ces moulinets se négocient couramment entre 20 et 30 000 euros pièce.
Pour la petite histoire, Zane Grey était, dans les années vingt et trente, devenu milliardaire en vendant à Hollywood les droits de ses nombreux romans « western » pour les premiers films muets. Outre sa passion pour les actrices de l’époque, son autre folie, qui lui coûtait d’ailleurs beaucoup plus cher, était la pêche aux thons géants, marlins et espadons, qu’ils poursuivait sur tous les océans de la planète. Il demanda donc à la maison Hardy de lui fabriquer les meilleurs moulinets possibles, quels qu’en soient les prix de fabrication.
En France, c’est Louis Perrot, fabricant d’articles de pêche à Paris, quai de la Tournelle, qui fabriqua avant-guerre et jusqu’au début des années soixante, les moulinets « Espadons », très semblables aux Fortuna de Hardy, et qui permirent, sur les côtes bretonnes, la capture de nombreux thons pesant entre 200 et 350 kilos.
Moins bien finis que les Fortuna et moins performants, ils sont surtout recherchés par les collectionneurs français car fabriqués en beaucoup plus petites séries.