Il existe un monde mystérieux.

Un labyrinthe appelant à la flânerie onirique et au réveil de la nostalgie. Dans cet univers aux décors immersifs, l’imaginaire conduit à l’inspiration et à la rencontre de l’autre. De l’inconnu. Le temps s’y est arrêté entre passé et futur, à cet instant où l’impossible devient possible.

Une utopie merveilleuse.

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Les moulinets à tambour-fixe de collection

Avant 1930 n’existaient sur le marché français que de petits moulinets en cuivre ou en laiton, que l’on retrouve aujourd’hui dans les brocantes ou les vide-greniers, et à l’époque dans des pages entières des catalogues de Manufrance. 

La société américaine Shakespeare, qui fabriquait également des moulinets de casting, des cannes et des leurres, fut la première à construire un moulinet à tambour fixe dit « capoté », sans pick-up.

Depuis le milieu du XIXème siècle, les progrès de la petite métallurgie, surtout en Angleterre, avaient permis la fabrication de moulinets tout en cuivre de taille réduite. Importés d’outre-Manche, ces modèles restaient très primitifs dans leur conception, ne présentaient aucun système de freinage, un simple cliquet grossier assurant le dévidement de la bobine. Ils n’avaient pas non plus de guide ligne et leurs flasques mal ajustées coinçaient fréquemment la soie entre la bobine et la cage. Pour pêcher la carpe en étang ou le brochet au vif, ces engins ne servaient que de réserve de ligne et en aucun cas à lancer. Il y avait bien, pour les messieurs de la ville qui pêchaient la truite ou le saumon au devon, les moulinets à quadruple récupération importés d’Amérique, dits justement « pour la pêche au lancer à l’américaine ». Mais ces engins coûtaient chers et quand, lors du lancer, leur déroulement ne se faisait pas sous le contrôle de mains expertes, c’était la perruque assurée et la fin de la partie de pêche.

Les moulinets de « casting » de marque Shakespeare, à tambour tournant et récupération multiplicatrice, avec guide fil répartisseur du fil sur la bobine, ont été déclinés en dizaines et dizaines de modèles, dans plusieurs tailles différentes pour chaque modèle. Sur plus de trente ans, ils furent vendus à des millions d’exemplaires, ce qui est loin d’être le cas de leur production de moulinets à tambour-fixe.

Contrairement aux moulinets à mouche, les moulinets à « tambours-fixes » les plus recherchés sont français.

Et puis, vers la fin des années trente, arrivèrent en masse sur le marché, les premiers modèles de moulinets dits à « tambour-fixe ». En fait, ces moulinets dont le principe reposait sur le fait que le fil ne se déroulait pas lors des lancers, depuis une bobine tournant sur son axe, mais « en bout » depuis une bobine (tambour) fixe, a révolutionné toutes les pêches au lancer et surtout celles nécessitant l’emploi de leurres légers.

Le principe en fut inventé en 1905 par le vicomte Henri de France, habitué des concours de lancer qui réunissaient des deux côtés de la Manche les « sportsmen » français et britanniques qui s’adonnaient à ce sport très chic, sur les pelouses du Bois de Boulogne.

Le vicomte Henry de France, véritable inventeur avec sa « boite de conserve à petits pois », du principe du moulinet à tambour fixe a gagné avec celle-ci de nombreuses compétitions de lancer en distance.

Avec ce « moulinet » plus que rudimentaire, Henry de France gagna plusieurs épreuves internationales de « distance poids ».

On le voit ici, avec sa « boîte de petits pois » transformée en moulinet à tambour fixe, sur l’estrade du Cercle du Tir aux pigeons du Bois de Boulogne, lors d’une compétition.

L’histoire a retenu qu’avec une boîte de conserve vide ayant contenu des petits pois, autour de laquelle il enroulait avec un petit crochet à bottines, le fil de gut ou de soie tressée et qu’il avait fixé sur la poignée de sa canne par un pied coudé métallique fixé sur le fond non ouvert de la boîte de conserve, le vicomte gagna cette année-là toutes les épreuves de lancer en distance comme en précision.

Il fallut néanmoins attendre encore une trentaine d’années, pour que des modèles de moulinets à tambour fixe plus sophistiqués, à peu près tels que nous les connaissons encore aujourd’hui, apparaissent sur le marché.

Commercialisés par Pezon & Michel, les Luxor ont révolutionné la pêche au lancer.

Page de gauche : deux moulinets Luxor « classiques » avec pick-up ; page de droite : le Luxor Relax sans pick-up apparent, à tambour capoté.

Et là, pour une fois, il ne s’agissait pas de modèles importés du Royaume-Uni ou des États-Unis, mais de fabrication bien française. Dans le sillage du vicomte Henri de France, de nombreux ingénieurs et artisans de notre pays, développèrent ce type de moulinet. Ici encore, nous retrouvons Pezon & Michel qui a, pendant trois décennies, commercialisé la production d’un ingénieur de génie, M. Mauborgne, sous le nom de « Luxor ».

En tout, quatre modèles, avec des variantes de vitesse de récupération, pour lancer de l’ultra-léger au presque tout-gros. Le plus fantastique : le Luxor Suprème, qui déjà à l’époque (1955), coûtait trop cher à produire et fut très vite arrêté.

Vieux de plus de 80 ans, le Luxor Luxe est encore aujourd’hui utilisé pour la pêche de la truite ou des carnassiers (perche, brochet, sandre…). Personnellement je le préfère et de loin à toutes les « japonnaiseries » modernes à huit, dix ou douze roulements à billes.

Surement le moulinet le plus vendu dans le monde : le Mitchell 300 fabriqué à l’usine de Cluses (Haute-Savoie) et distribué par la société Garcia aux États-Unis (en 1966, la société Mitchell plus de 20 millions de moulinets).

D’autres marques et surtout des petits artisans, (mécaniciens, ajusteurs, garagistes) créèrent et commercialisèrent des petites séries, très recherchées aujourd’hui : Vamp, Capta, Croizix, Huillet, Centaure, Punch, Fraser, Aiglon… Pratiquement toutes ces marques brevetées avant-guerre trouvèrent leur plein développement et leur public immédiatement après la fin des hostilités en 1945 et dans les années 50-60. Et, comment, ici, ne pas citer la maison Mitchell, qui comme son nom ne l’indique pas, est bien française et non pas américaine.

C’est tout de suite après la guerre, que le célèbre modèle 300, le moulinet le plus vendu dans le monde, sort des ateliers savoyards de Cluses. En 1961, le 5 000 000ème moulinet est fêté, en 1966 le 10 000 000ème et en 1971 le 20 000 000ème.

Outre-Atlantique le succès du Mitchell 300 est tel, que le distributeur américain rachète la société française, dont la production continuera de se faire en Savoie jusqu’au début des années 80.

Ensuite, la concurrence sud-asiatique deviendra féroce et les merveilles de précision et d’engrenages, assemblés dans les vallées savoyardes, ne pourront plus lutter contre le déferlement à vil prix des marques japonaises, coréennes et maintenant chinoises.

Les premiers moulinets

Comme pour beaucoup d’objets, il semblerait que les Chinois aient les premiers inventé les moulinets pour la pêche. Une gravure du Xème siècle montre même un de ces engins avec manivelle directement monté sur une canne à pêche.

En Europe, ce n’est que sept ou huit siècles plus tard, qu’apparaîtront en Angleterre des sortes de treuils en bois assujettis, non pas sur la canne mais sur une plaque de bois, portée par un domestique ou un jeune garçon – l’école n’était pas obligatoire, et il valait mieux être sur les bords d’une rivière écossaise que dans un boyau de mine du Pays de Galles –, qui avaient pour charge de donner ou de reprendre de la ligne selon les instructions du pêcheur.

Ces gros « moulinets » servaient en fait de réserve de ligne pour pêcher les saumons, les carpes ou les gros brochets, passe-temps déjà fort apprécié des nobles dans les îles britanniques vers la fin du XVIIème siècle.

En France, la première représentation d’un moulinet apparaît dans le Pêcheur français, de Kresz Ainé, publié à Paris en 1818.

Sur cette peinture chinoise de Ma Yuan, le peintre représente un pêcheur à la ligne du VIème siècle utilisant un moulinet.

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