Il existe un monde mystérieux.

Un labyrinthe appelant à la flânerie onirique et au réveil de la nostalgie. Dans cet univers aux décors immersifs, l’imaginaire conduit à l’inspiration et à la rencontre de l’autre. De l’inconnu. Le temps s’y est arrêté entre passé et futur, à cet instant où l’impossible devient possible.

Une utopie merveilleuse.

Le comptoir général présente

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Zane Grey

Contemporain d’Ernest Hemingway, écrivain à succès comme lui, mais plutôt dans le genre roman de gare, des romans d’aventures du Far WestZane Grey est devenu l’un des premiers auteurs millionnaires. 

 

Pratiquement tous ses romans, ont été adaptés par la jeune industrie du cinéma d’Hollywood, au début en noir et blanc muet, puis en « parlant ».

Il est l’auteur de plus de 90 livres, dont certains publiés à titre posthume ou basés sur des articles publiés à l’origine dans des magazines de chasse et de pêche. Ses ventes totales de livres dépassent les 40 millions d’exemplaires. Pourtant ses débuts en tant qu’écrivain furent laborieux, et c’est parce qu’il abhorrait son métier de dentiste qu’il se lança dans l’écriture, de récits de ses aventures de pêche tout d’abord.

Au grand désespoir de son père, dentiste de renom, Zane Grey abandonna au bout de trois ans son cabinet de dentisterie new-yorkais, pour se consacrer cette fois à l’écriture d’un nouveau genre, très apprécié au début du XXème siècle aux États-Unis : les histoires et légendes du Far West. De 1916 à 1926, Grey fut tous les ans dans la liste des meilleurs best-seller, ce qui nécessitait des ventes de plus de 100 000 exemplaires chaque fois.

 

 

 

 

Premier auteur à succès millionnaire grâce à ses adaptations hollywoodiennes.

Comme Hemingway, il se levait très tôt et écrivait jusqu’en milieu ou fin de matinée, pour retrouver ensuite sa famille ou ses amis et consacrer le reste de la journée à la chasse ou à la pêche. Sa plume fut si prolifique que même après sa mort, en 1939, son éditeur la maison Harper, avait un tel stock de manuscrits, qu’à raison d’un titre par an, elle continua à publier un nouveau titre chaque année jusqu’en 1963.

Mais s’il gagna énormément d’argent avec ses droits d’auteur, c’est surtout son association avec la toute jeune industrie cinématographique à Hollywood, qui lui assura une immense fortune en droits d’adaptations. Plus de cinquante de ses romans « Far West » furent adaptés à l’écran soit par la Fox ou par la Paramount, et donnèrent naissance à plus de cent films, muets puis parlants.

 

Avec son jeune frère Romer et un joli Black-Bass.

Bel homme, riche et célèbre, Zane Grey comme Hemingway eut de nombreuses aventures féminines.

L’adaptation de ses très nombreux romans « Far West » au cinéma y compris et même surtout pendant les années de la Grande Dépression aux États-Unis, lui rapporta énormément d’argent, qu’il dépensait sans compter dans ses voyages de pêche.

Avec tout cet argent, il finança sa vraie passion : la pêche sportive.

Au large de Los Angeles, sur l’île de Santa Catalina, Zane Grey pose fièrement devant les bâtiments du Tuna Club.

Quand il arrachait des dents à New York, il consacrait déjà tous ses weekends avec son frère à aller pêcher la truite à la mouche dans le Delaware et en Pennsylvanie. Mais c’est son association avec Hollywood qui, une dizaine d’années plus tard, allait lui faire découvrir l’île de Santa Catalina, là où la pêche au gros avait réellement été inventée en 1898, avec la création du très chic et sélect « Thon Club de Catalina ».

Située au large de Los Angeles, cette île de magnats et de milliardaires était entourée à l’époque par les eaux extrêmement poissonneuses du Pacifique. Zane Grey, d’ailleurs, dans ses écrits comparait les gigantesques bancs de thons, qu’on voyait chasser en surface à des kilomètres à la ronde autour des bateaux, aux immenses troupeaux de bisons qu’un demi-siècle plus tôt Buffalo Bill décrivait dans les grandes plaines.

Avec un grand marlin noir capturé à Tahiti où il fut le premier pêcheur sportif à explorer cette zone du Pacifique. Remarquons l’incurvation de la canne en bambou refendu, qu’il fallait redresser après la capture de chaque grand poisson.

Mais il n’y avait pas que les thons autour de Catalina, l’océan regorgeait aussi de marlins et surtout d’espadons xiphias. Et, pour Zane Grey qui avait pourtant capturé en Nouvelle-Écosse un thon géant de 758 livres (record du monde en 1924) et à Tahiti un marlin de plus de mille livres, le plus valeureux adversaire de tous les océans était sans contestation possible, le véritable espadon Xiphias gladius. Ce poisson lui valut ses plus grands succès et, du moins au début, l’estime et le respect de ses pairs, membres du Tuna Club de Catalina.

Le premier Tuna Club sur l’île de Santa Catalina, en Californie.

Pour pêcher l’espadon toute l’année, il acheta une immense maison sur l’île.

L'immense maison que Zane Grey se fit construire sur l'île de Santa Catalina.

En 1920, il nous dit qu’en 93 jours de pêche à l’Espadon, il en aperçut 140, présenta ses appâts à 94 d’entre-eux, eut onze touches, en ferra sept mais ne réussit qu’à en gaffer quatre. Par rapport à d’autres pêcheurs, membres ou invités du Tuna Club, il faut reconnaître qu’il ne fut pas très chanceux comparés à d’autres bien souvent débutants dans la pêche au gros, dont certains capturèrent des espadons en recherchant un thon ou un marlin.

Son énorme « bateau-habitation », auparavant propriété du Kaiser Guillaume II, lui permettait de sillonner et de pêcher dans tous les océans du globe.

Pourtant, Zane Grey avait spécialement équipé son bateau, dont le nom « Gladiator » faisait bien évidemment référence à ce poisson (Xiphias gladius), pour ne rien laisser au hasard dans cette quête. Une plateforme sur laquelle un guetteur très souvent lui-même– pouvait se tenir avait été installée à mi-mât, afin de repérer de plus loin les espadons quand ils se prélassent en surface, leur dorsale et le lobe supérieur de leur caudale nettement visibles au-dessus de la surface par mer calme.

Depuis cette plateforme surélevée, il pouvait également présenter beaucoup plus efficacement, et de plus loin, ses appâts devant les poissons repérés, ce qui lui permettait d’enregistrer plus de touches que les autres bateaux. Il insistait tout particulièrement sur la fraîcheur des appâts (calmars ou poissons volants) qu’il faisait passer sous le nez des espadons.

Il racontait à tous ceux qui voulaient bien l’écouter, comment il s’entraînait à ramer tous les jours en hiver, pour que ses muscles soient en forme au printemps et en été quand les espadons apparaissaient en surface, et comment il trempait ses mains dans l’eau de mer, pour les durcir et les tanner en vue des futurs combats. 

 

En 1921, il captura son plus gros espadon : 418 livres de muscles et d’écailles.

Avec un grand marlin noir dépassant les 1 000 livres, capturé en Nouvelle-Zélande. Remarquons ici encore l’incurvation de la canne en bambou refendu et le moulinet Vom Hofe. Bien peu de pêcheurs, aujourd’hui, seraient capables d’un tel exploit avec un tel matériel.

À Santa Catalina, Zane Grey inspecte un moulinet prototype qui ne sera jamais commercialisé.

Ce fut le deuxième plus gros jamais capturé à Catalina et de nombreux membres le félicitèrent. Mais quand quelques semaines plus tard, un petit bout de femme pesant moins de 45 kilos, épouse d’un des membres du Club, Mrs Spalding ramena au dock un espadon de 426 livres, Zane Grey « péta un plomb ». Il est vrai que ce soir là, de nombreux membres du club lui téléphonèrent pour lui demander s’il savait combien de milles nautiques à la rame, madame Spalding avait effectués, durant l’hiver et pourquoi plutôt que tremper ses mains dans la saumure, cette dame préférait les entretenir avec des crèmes anti-rides.

Dès le lendemain, il prétendit qu’il était impossible qu’un tel poisson ait été pris par cette femme, du moins selon les règles du Club, il avait forcément fallu qu’elle fut aidée durant le combat, par un des membres de l’équipage.

De nombreux membres du Club, qui n’aimaient pas l’arrogance de Zane Grey, n’attendaient que cet incident pour lui demander de s’excuser ou de démissionner. Il fit les deux, et s’il continua à pêcher les eaux de Santa Catalina, il ne remit jamais les pieds dans les salons du plus fameux et sélect club de pêche du monde à l’époque.

En plein effort, « à la loyale » combattant probablement un autre grand marlin, avec un simple paire de gants, pour que la ligne en lin tressé ne lui entaille pas les doigts. Avant- guerre, comme pour Hemingway, il s’agissait réellement de « pêche sportive » au sens propre du terme.

Il n’empêche que Zane Grey fut probablement, immédiatement après la fin de la première guerre mondiale et jusqu’au début des années trente, et avant l’émergence des Hemingway, Lerner et Farrington, le plus talentueux pêcheur de tous les océans et de cette époque.

Pour rester avec les espadons au large de Catalina, il y captura en quelques années, à bord de son bateau Gladiator, 24 espadons et en fit prendre 18 à son frère, ce qui en pêche de jour, sur des poissons repérés en surface, constitue encore aujourd’hui, un exploit inégalé.

Son immense trois mats à voile et à vapeur qui lui servait d’habitation, le long duquel est amarré son célèbre « Gladiator », le bateau de pêche qui permettait la capture des grands poissons.

Parcourir la planète et montrer au monde entier la capture des plus gros poissons.

Et, puisqu’on ne voulait plus de lui au Tuna Club et dans les eaux de Californie, il allait grâce à son immense fortune parcourir les eaux des mers de la planète, et montrer au monde entier en faisant filmer ses exploits lointains par une équipe de caméraman de Hollywood– ce qu’il savait le mieux faire (en dehors d’écrire des best seller), capturer à la canne et au moulinet, les plus grands poissons des océans.

Il racheta l’énorme yacht à voile et moteur commandé par l’empereur allemand Guillaume II aux ateliers Krupp, et s’en servit comme bateau-mère (bateau habitation) pour ses expéditions lointaines.

Comme il pêchait aussi beaucoup à la mouche, il connaissait la qualité du matériel de la maison Hardy. Aussi, en 1928, leur demanda-t-il de lui fabriquer le meilleur moulinet de pêche au « tout gros », « quel qu’en soit le prix », ajouta-t-il. Deux années plus tard sortait des ateliers d’Alnwick, le moulinet qui porte son nom.

Il commanda à la maison anglaise Hardy de lui fabriquer les meilleurs et plus robustes moulinets de pêche au gros, moulinets qui portent d’ailleurs encore son nom, embarqua des douzaines de cannes en bambou ou hickory refendu des meilleurs artisans,  des centaines de kilomètres de ligne en lin tressé, des milliers d’hameçons et de bas de ligne… Ainsi équipé, Zane Grey en compagnie de son frère puis de ses fils, quand ils furent en âge de le suivre, allait explorer –personne n’y avait pêché sportivement avant lui– les eaux de la grande barrière australienne, puis la Nouvelle-Zélande en 1926 où les films et photos de ses captures nous font encore rêver aujourd’hui.

En 1928, il capture à Tahiti un gigantesque marlin bleu pesant encore 1 040 livres après que les requins, le long du bateau, n’en aient arraché au moins 200 livres de chair… Ce qui en fait le premier poisson de plus de mille livres jamais capturé à la canne et au moulinet. 

 

Le modèle 7 pouces du moulinet qui portait son nom contenait mille mètres de lignes 39 brins, en lin tressé.

Mutilé en fin de bagarre par les requins, qui lui arrachèrent au moins 200 livres de muscles le long de la colonne vertébrale, ce grand marlin bleu, capturé à Tahiti, n’en pesait encore pas moins de 1 040 livres. Remarquons à l’arrière-plan la chambre photographique professionnelle et l’assistant preneur de vues, que Zane Grey emmenait dans tous ses voyages.

À la pêche à la mouche de la steel-head, avec du matériel Hardy, sur la rivière Umpqua.

Mais en vrai et passionné pêcheur, Zane Grey ne pêchait pas que le « tout gros ». Il fut dans le golfe du Mexique, dès 1906 l’un des pionniers de la pêche du tarpon sur ligne légère.

Dans les années vingt, il pêche tous les hivers dans les keys de Floride le bonefish à la mouche. Dans l’Oregon (rivière Umpqua) et le nord de la Californie, il est encore aujourd’hui considéré comme un des meilleurs pêcheurs à la mouche de steelheads et de saumons pacifiques. En Nouvelle-Zélande, il fut l’un des premiers pêcheurs de grosses truites à la mouche. 

 

Sur le toit de son bateau de pêche, confortablement installé, il peut quand la mer est belle, observer la surface de l’océan, et une éventuelle nageoire de grand poisson, marlin ou espadon.

Pour en savoir plus sur les exploits de ce pêcheur complet, qui d’après ses frères et son épouse, pendant trente ans pêcha en moyenne 300 jours par an, je ne saurais trop vous conseiller de lire la douzaine de gros livres et les très nombreux articles qui relatent ses aventures aux quatre coins du monde avec une canne à mouche à truite ou une énorme canne à « tout-gros » à la main. 

 

Spécialement pour la pêche de l’espadon (Xiphias gladius), en anglais « swordfish » ou poisson-épée, il avait mis au point et fait fabriquer un hameçon ultra-résistant.

Après son décès, nombre de ses aventures de pêche, tant à la mouche qu’au « tout-gros », furent reprises, dans différents ouvrages posthumes.

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