Il existe un monde mystérieux.

Un labyrinthe appelant à la flânerie onirique et au réveil de la nostalgie. Dans cet univers aux décors immersifs, l’imaginaire conduit à l’inspiration et à la rencontre de l’autre. De l’inconnu. Le temps s’y est arrêté entre passé et futur, à cet instant où l’impossible devient possible.

Une utopie merveilleuse.

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Hemingway : le pêcheur

Des livres entiers ont été écrits sur le journaliste, l’écrivain, l’aventurier, le correspondant de guerre, le chasseur, et bien d’autres facettes de sa vie. Nous ne nous intéresserons ici qu’à Ernest Hemingway, le pêcheur.

Ernest Hemingway était un véritable pêcheur, qui prenait autant de plaisir à la capture d’un marlin de plus de mille livres qu’à celle d’une truite d’une livre. C’est d’ailleurs en eau douce, dans les ruisseaux et les lacs du nord du Michigan, où son père l’emmenait souvent quand il n’avait que quatre ou cinq ans, qu’il prit ses premiers poissons. Les souvenirs de pêche à la truite ou plutôt au saumon de fontaine (brook trout) de son adolescence ont donné matière à de nombreuses nouvelles comme La rivière au cœur double ou Les Aventures de Nick Adams (The Nick Adams Stories), publiées entre 1922 et 1933. Lors de son premier séjour à Paris comme correspondant étranger du Toronto Star, il écrira au hasard de ses voyages à travers l’Europe plusieurs reportages sur la pêche : Tuna fishing in Spain (La pêche du thon en Espagne), février 1922 ; Fishing the Rhône canal (La pêche dans le canal du Rhône), juin 1922 ; Trout fishing in Europe (La pêche de la truite en Europe), novembre 1923.

Ernest Hemingway, âgé de 17 ans, pêche à la mouche la Grande Rivière au cœur double.

Âgé de six ou sept ans, il pêche la truite (en fait, le saumon de fontaine) à la sauterelle, dans les ruisseaux du Michigan.

Si Ernest Hemingway est surtout connu pour la pêche au gros, « papa » pêchait aussi à la mouche.

À Sun Valley, dans l'Idaho, Hemingway est content de montrer les deux belles truites arc-en-ciel qu'il vient de capturer. La canne et le moulinet sont de marque Hardy.

Son ami romancier et également pêcheur, John Dos Passos, le persuade en 1928 de venir le retrouver à Key West. Ernest Hemingway commençait à être connu car la parution, l’année précédente, de son livre The sun also rises (Le soleil se lève aussi) avait été un succès immédiat. Tout de suite, il adora cette ville qui à l’époque n’était qu’une grosse bourgade de pêcheurs au charme colonial. Dos Passos lui fit prendre son premier espadon-voilier et ses premiers tarpons, et deux années plus tard avec l’argent de L’Adieu aux armes, publié en 1929, l’écrivain achetait à Key West une magnifique maison de style colonial espagnol, qui est aujourd’hui transformée en musée. Très vite les sailfish et les tarpons de Floride n’ont plus de secret pour lui. En 1932, il fait son premier voyage à Cuba traversant le Gulf Stream dans le petit bateau de Joe Russel, le patron quelque peu contrebandier du fameux bar de Key West, le « Sloppy Joe ». À La Havane, « papa », surnom de l’écrivain, ne découvrit pas seulement la grande île mais également ses marlins…

Ernest, en maillot rayé, et un petit marlin du Gulf Stream, à bord du Pilar, son célèbre bateau.

C’est à 29 ans que sa passion pour la pêche « au gros » se déclenche réellement.

Le premier marlin bleu capturé à Bimini, qui n'ait pas été mutilé par les requins qui pullulaient dans ces eaux. Il fallait une force hors du commun pour combattre et vaincre le plus rapidement possible ces grands poissons, avant que les requins ne passent à l'attaque.

Le Gulf Stream et les grands prédateurs à rostre qui chassent dans ses eaux bleues allaient se révéler un véritable challenge pour lui. En l’espace de trois brèves saisons de pêche, il était devenu certainement le meilleur spécialiste de la pêche de ces grands poissons. En 1934, il publia une étude scientifique sur les poissons de cette famille qui, encore aujourd’hui, fait autorité pour cette partie du monde. Remarquons ici au passage que le fantastique grand poisson du Vieil Homme et la Mer n’était pas un espadon, ainsi transformé par un coup de dictionnaire magique de La NRF « Nouvelle Revue française », mais un marlin bleu géant comme il en rôde encore aujourd’hui dans les eaux sombres du Gulf Stream. C’est d’ailleurs au début des années trente, soit environ vingt ans avant que cela ne devienne le sujet du Vieil Homme et la Mer qu’Ernest Hemingway entend parler de la mésaventure arrivée à un vieux pêcheur cubain qui, en combattant un marlin gigantesque, a été entraîné pendant deux jours et deux nuits dans le Gulf Stream. Quand il put finalement harponner son poisson, les requins commencèrent la curée. Le vieil homme fut retrouvé par d’autres pêcheurs, à moitié mort de soif, délirant dans son bateau et les requins tournaient toujours autour de la barque.

Le petit port de pêche cubain de Cojimar où vivait le vieil homme.

Dans le Gulf Stream, au large de Cuba, « Papa », à bord du Pilar, attend la touche en compagnie de son fidèle marin Gregorio Fuentes.

Lors de sa troisième visite à Cuba, il prit plus de cinquante marlins.

Hemingway ne faisait pas qu'écrire, il lisait aussi énormément, les grands auteurs français ou russes, entre autres.

« Papa » avec de très gros wahoos et son marin Gregorio.

C’est lui qui en édicta les règles de la grande pêche sportive : « Le développement de la pêche au tout gros a été retardé pendant de nombreuses années par un matériel inadapté à ces grands poissons. Aujourd’hui, cette pêche est en passe de devenir sans aucun intérêt du point de vue sportif, à cause justement du développement ces dernières années d’un matériel trop efficace… Les équipements disponibles aujourd’hui trouvent trop souvent leur justification au travers du désir bien compréhensible de guides de pêche qui veulent faire prendre de gros poissons à leurs clients, alors que ces derniers sont physiquement incapables d’amener ces poissons à la gaffe d’une façon honnête et sportive… Les pêcheurs quand ils racontent leur bagarre avec un grand poisson, oublient de dire que ce dernier a un hameçon planté dans la mâchoire, le fond de la gorge ou l’estomac. Il me semble que c’est un avantage déjà suffisant pour le pêcheur, que ce soit le poisson et non lui qui ait l’hameçon dans la bouche, et que si ce dernier veut justement pouvoir être fier de sa capture, il doit amener le poisson par son propre effort, en tenant la canne et le moulinet dans ses mains, ou si ces derniers sont trop lourds, en en supportant le poids par un harnais prenant appui sur ses épaules ou sur son dos. Enfin, il ne doit recevoir aucune aide extérieure jusqu’à ce que le bas de ligne soit amené par lui et lui seul, à portée de main du guide qui l’assiste.» On ne saurait être plus clair, l’éthique de la grande pêche sportive était rappelée et les règles du jeu définies.

En 1939, il fut le premier vice-président de l’International Game Fish Association (IGFA).

La célèbre couverture du magazine Life où les premières « bonnes pages » du Vieil homme et la mer furent publiées.

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